Sélection bibliographique

Eduardo Carnevale, Centre de documentation pour l’alphabétisation et l’éducation populaire du Collectif Alpha

À travers les choix de cette sélection bibliographique, nous voulons poser la question du sens et de l’utilité d’ancrer sa pratique de formateur·rice dans une culture pédagogique. Comme il est toujours bon de le rappeler, l’alphabétisation populaire est porteuse d’un projet politique : la transformation des rapports sociaux d’oppression qui, entre autres, perpétuent la reproduction des inégalités sociales et, partant, de l’analphabétisme. C’est pourquoi nos méthodes pédagogiques doivent traduire nos finalités et nos intentions sociales1. À cette fin, les associations d’alphabétisation populaire ont produit une importante culture pédagogique en s’inscrivant dans des courants comme la pédagogie des opprimés de Paulo Freire2, l’Éducation Nouvelle et le mouvement Freinet. Mais, comme toute culture, cette culture pédagogique doit être vivante. Autrement dit, elle doit être adaptée, développée et renouvelée en permanence en fonction de l’évolution sociétale et des situations pédagogiques.

Le premier ouvrage de cette sélection, de Philippe Meirieu, nous fait d’emblée entrer dans la réflexion pédagogique à partir de cinq « lieux communs » auxquels tout·e formateur·rice a déjà été confronté·e dans sa pratique. Ensuite, Odette Bassis nous démontre concrètement comment la démarche d’auto-socio-construction des savoirs construit la relation d’apprentissage sur des principes d’égalité, afin de rendre l’apprenant·e critique et créateur·rice. Suit un dossier, compilé par Marie Fontaine, qui fait la synthèse sur la nécessité d’une praxis pédagogique bien maitrisée par le formateur ou la formatrice afin qu’il ou elle puisse s’adapter aux différentes situations pédagogiques qui se présentent. Le quatrième ouvrage fait état d’une recherche qui démontre la pertinence de la pédagogie Freinet appliquée dans un contexte socioéducatif difficile, dans le but d’en finir avec l’échec scolaire. Le suivant, un ouvrage collectif dirigé par Maria-Alice Médioni et Valérie Péan, montre comment débuter l’apprentissage d’une langue dans une visée émancipatrice et maintenir l’enthousiasme de départ grâce à une méthode basée sur les choix de l’Éducation Nouvelle. En complément, nous avons retenu le coffret de Vicky Juanis et Gisèle Volkaerts qui propose une méthodologie pour enseigner le français oral à des adultes en alpha-FLE. Nous poursuivons cette sélection avec un ouvrage de Patrick Michel qui, à partir d’apports théoriques, méthodologiques et pédagogiques variés, a conçu une méthode complète pour enseigner la lecture et l’écriture à des adultes analphabètes. Vient ensuite une présentation de la méthode ECLER qui, s’inspirant notamment de Freinet, de Freire et des réflexions de l’Association Française pour la Lecture (AFL), est particulièrement bien adaptée à l’apprentissage de l’écriture dans le contexte de l’alphabétisation. Pour suivre, un document sur le langage intégré qui se base sur le postulat que l’apprentissage de la lecture et de l’écriture se fait à travers la production d’écrits. Puis, le « journal de bord » de Sophie Zeoli vient illustrer comment, au jour le jour, on peut faire évoluer sa pratique de formateur·rice avec le souci d’un encadrement pédagogique murement réfléchi. Enfin, les deux dernières références décrivent des méthodes pédagogiques alternatives dans le domaine des mathématiques : d’abord, un double ouvrage de Stella Baruck qui propose une méthode pour enseigner les mathématiques en leur rendant une intelligibilité pour tout un chacun, et ensuite un livre de Paul Le Bohec qui a expérimenté et développé la méthode naturelle Freinet en mathématique.

Malgré cette sélection déjà bien fournie, la réflexion sur les méthodes pédagogiques est loin d’être épuisée…

Philippe MEIRIEU, Pédagogie. Des lieux communs aux concepts clés, ESF, 2013, 180 p.

Les débats éducatifs s’organisent souvent autour de « lieux communs » qui suscitent des malentendus au sein de la communauté pédagogique et du grand public : les méthodes actives, la motivation, l’individualisation, le respect de l’enfant et l’éducation à la liberté sont ainsi présentés comme des évidences avant de devenir des lignes de clivage dans le débat sur la pédagogie.

Cinq chapitres, chacun consacré à un de ces lieux communs, vont permettre à l’auteur de passer ces derniers au crible avec comme objectif d’en analyser les différentes interprétations afin d’en montrer les enjeux réels, puis de les redéfinir dans toute leur pertinence. Un court encadré synthétisant l’état de la question vient clôturer chaque chapitre.

La conclusion du livre, La pédagogie n’est pas un luxe, se termine par cette constatation : « Le résultat de cette évolution est catastrophique. Face à l’oubli d’un pan entier de notre culture éducative, en l’absence de tout travail à caractère proprement pédagogique, ne subsistent plus que deux types de discours : d’une part, des études spécialisées inutilisables par les praticiens en raison de leurs sempiternels préalables méthodologiques et du caractère strictement descriptif de leurs développements… et, d’autres part, la langue de bois institutionnelle, sorte d’espéranto néolibéral, prônant le ‘management participatif’ et organisant le contrôle technocratique des résultats sans jamais se soucier de ce qui se fabrique dans la classe, aussi bien en terme de transmission de culture que d’émergence des sujets. » Loin de rester sur ce constat pessimiste, Philippe Meirieu appelle « à replacer l’histoire de la pédagogie et la réflexion pédagogique au cœur des ‘sciences de l’éducation’ » car « il en va, tout à la fois, de la reconnaissance sociale des métiers de l’éducation et de la qualité du débat démocratique sur notre avenir commun ».

Odette BASSIS, Se construire dans le savoir à l’école, en formation d’adultes, ESF, 1998, 284 p.

Comptant parmi les pionnières de l’Éducation Nouvelle, l’autrice présente une analyse et une théorisation de la démarche pédagogique que l’on nomme « auto-socio-construction du savoir ». Des démarches menées dans des classes et des stages d’adultes illustrent son propos.

L’ouvrage est composé de quatre parties.

La première partie, La démarche d’auto-socio-construction du savoir, aborde les paradoxes sur lesquels se fondent la notion et la pratique d’une telle démarche, et ce, dans une tentative de modélisation réalisée à partir d’une interrogation de fond sur le savoir mais aussi à partir du parcours jalonné des processus qui jouent dans toute démarche de ce type.

La deuxième partie, Devenir concepteur de ses savoirs, est toute entière consacrée à l’exposé et à l’analyse de deux démarches clés d’auto-socio-construction (sur la numération et sur les polygones) afin de saisir, au plus près des vécus des apprenants, quel autre rapport à l’apprentissage se construit.

La troisième partie, Pratiques de transmission, freins et obstacles, est directement en prise avec la formation/transformation des adultes puisque, traitant des effets contestables des pratiques les plus habituelles de la transmission, il avance des éléments d’analyse critique de ces dernières.

La quatrième partie, La formation, tremplin pour changer, présente deux grands projets réalisés dans le cadre de la formation des enseignants (formation initiale et continue) : l’un en articulation avec une ZEP de la région parisienne, l’autre en vue d’une transformation des pratiques scolaires dans la perspective du développement d’un pays, le Tchad, où a travaillé Odette Bassis.

Marie FONTAINE, Des outils pour l’alpha, en contexte. Influence des valeurs sur les choix pédagogiques, Collectif Alpha, 1001 idées pour enrichir sa pratique en alphabétisation, 2017, 28 p., www.cdoc-alpha.be/Record.htm?idlist=4&record=19110683124919388659

Ce dossier met en avant différentes démarches pédagogiques et différents outils didactiques qui peuvent être utilisés dans le cadre de l’alphabétisation. En effet, contrairement à l’enseignement obligatoire ou au FLE, le secteur de l’alphabétisation ne dispose que de très peu de ressources spécifiques. La production et l’édition de ressources adaptées au public de l’alpha sont restreintes à l’activité de quelques rares associations qui bénéficient d’une volonté militante et d’une longue expérience en alphabétisation populaire. Pourtant, adapter et inventer des outils pédagogiques a toujours été une nécessité depuis l’émergence de l’alphabétisation en Belgique. Pour l’autrice,
il était donc fondamental de ne pas se limiter à la pratique, car pour que celle-ci fasse sens, il est nécessaire de connaitre les principes qui la fondent, de savoir comment articuler différentes pratiques entre elles en les adaptant aux spécificités du public. Ce travail nécessite de bien connaitre les principes fondateurs de l’alpha populaire, son contexte et son public.

Le dossier est organisé selon trois axes :

  • le contexte historique du secteur de l’alpha et son impact sur ses outils ;
  • les sources d’inspiration, les références pédagogiques et les valeurs qui ont guidé les formateurs militants des débuts ;
  • les politiques éditoriales qui permettent la diffusion des outils et les recherches.

Yves REUTER (dir.), Une école Freinet. Fonctionnement et effets d’une pédagogie en milieu populaire, L’Harmattan, 2007, 254 p.

La recherche présentée dans cet ouvrage s’est déployée sur une période de plus de cinq années. Elle se rapporte à la mise en œuvre de la pédagogie Freinet sur la totalité d’une école (maternelle et primaire), le tout dans un contexte de réseau d’éducation prioritaire dans la banlieue lilloise accueillant essentiellement des enfants de milieux populaires en grande précarité. On y relève la description des dispositifs instaurés, leurs effets et la transférabilité des composantes de ce mode de travail. Elle explore une multitude de dimensions, telles que : les apprentissages disciplinaires, les violences à l’école, les relations école-familles, le rapport au travail scolaire, le passage dans l’enseignement secondaire, etc. À l’issue des cinq années de recherche, les auteurs ont dressé un bilan globalement positif. Il n’y a plus d’enfants relégués au fond de la classe et les élèves progressent. Le climat de travail s’est amélioré : moins de stress, plus de prise de risque, stimulation de tous et familles davantage satisfaites. Le travail ne fait plus l’objet de discours dévalorisants. Parents, maitres et autres élèves sont considérés comme des recours possibles face aux savoirs. Au volet psychopédagogique, les auteurs notent une diminution des phénomènes de violence, une meilleure intégration des « lois » et un plus fort sentiment de justice.

Même si les auteurs restent prudents quant à la transférabilité de l’expérience (la mise en œuvre de la pédagogie Freinet exige une adhésion totale et un engagement élevé de la part des enseignants, et certains principes pourraient même perdre toute leur valeur en cas d’application partielle), les conclusions de cette expérience confortent le choix de l’alphabétisation populaire de faire de la pédagogie Freinet une de ses références fondamentales.

Maria-Alice MÉDIONI, Valérie PÉAN (dir.), Débuter en langues. Pratiques de classe et repères pour enseigner, Chronique Sociale, 2017, 350 p.

Comment entretenir l’envie et le gout d’apprendre, et accompagner la prise de risque, l’engagement nécessaire, les premiers pas, les essais et les erreurs ? Comment à la fois susciter le questionnement des expériences passées, des routines, provoquer la perturbation, le conflit cognitif, et proposer, autoriser des ruptures, des déplacements ? Comment conjuguer sécurité, exigence et nécessité de faire évoluer les techniques, les savoirs et les valeurs ? Comment débuter l’apprentissage chaque fois qu’une situation nouvelle se présente, qu’il s’agit de relever un nouveau défi : le premier jour de formation ou lors d’une reprise après des congés par exemple ? Comment sortir les étudiants de l’isolement, leur apprendre à coopérer, à trouver des ressources, leur éviter un épuisement précoce face à des situations trop difficiles ? Tels sont les questions auxquelles les auteures de cet ouvrage collectif proposent de réfléchir et pour lesquelles elles avancent un certain nombre de propositions.

S’adressant prioritairement à des enseignants, débutants – qui y trouveront à la fois des pratiques de classe et des repères concernant des questions vives liées à leur métier –, ou plus chevronnés – qui souhaitent mettre à distance ou renouveler leurs pratiques –, l’ouvrage pourra également intéresser des formateurs d’adultes FLE ou alpha-FLE qui y puiseront tout autant matière à réflexion pour étayer leurs démarches et leurs animations.

Vicky JUANIS, Gisèle VOLKAERTS, Comprendre et parler. Apprendre le français oral en alphabétisation et en français langue étrangère (FLE), Lire et Écrire Bruxelles, 2020

Résultat de nombreuses années de recherche, d’accompagnement de formateur·rice·s et d’animation en alpha oral et FLE, cette mallette propose une méthodologie pour enseigner et apprendre le français en développant simultanément les deux composantes de la compétence orale : la compréhension et l’expression.

La méthodologie proposée permet :

  • de mettre en place des dispositifs spécifiques
    à l’apprentissage de l’oral ;
  • de construire la progression des apprentis-sages ;
  • de suivre des démarches structurées ;
  • de mettre en œuvre un dispositif pédagogique et des modalités de travail qui permettent l’engagement actif des participant·e·s ;
  • de réaliser une évaluation et une auto-évaluation constantes ;
  • d’exploiter de manière approfondie des supports audios et visuels ;
  • de réaliser des traces spécifiques pour soutenir les personnes non alphabétisées dans la mémorisation des contenus travaillés.

Pour aider les formateurs et formatrices à mettre en œuvre la méthodologie proposée, la mallette contient différents supports :

  • un livre avec 4 thématiques et 24 démarches pédagogiques ;
  • des illustrations ;
  • un lien vers un site internet où sont accessibles des documents audios : www.comprendreetparler.be

Des formations (et des présentations en ligne) qui donnent accès, gratuitement, aux supports pédagogiques sont également proposées par les réalisatrices de la mallette.

Patrick MICHEL, Du sens au signe, du signe au sens. Une méthode intégrative pour apprendre à lire et devenir lecteur à l’âge adulte, Les Éditions du Collectif Alpha, 2013, 224 p.

Cet ouvrage se présente comme une méthode, concrète et pratique, pour construire l’apprentissage de la lecture avec des adultes. Il ne s’agit pas d’un manuel présentant des textes à faire lire ou des exercices à effectuer, il s’agit plutôt d’un chemin balisé permettant au formateur de développer sa créativité pédagogique en suivant des étapes pas à pas et en s’inspirant d’exemples issus d’une pratique mise en œuvre avec des groupes d’apprenants adultes fréquentant le Collectif Alpha. Cette méthode est issue d’une longue expérience de terrain qui s’est développée en interaction avec une réflexion nourrie d’apports théoriques, méthodologiques et pédagogiques nombreux. Elle s’inspire de la pédagogie Freinet et plus particulièrement de la Méthode Naturelle de Lecture-Écriture (MNLE), ainsi que de multiples apports récents concernant l’importance de la phonologie dans le développement des compétences de déchiffrement.

L’ouvrage est constitué de quatre chapitres :

  • De la parole au texte : comment créer des textes de référence à partir d’un album illustré ?
  • Du texte à l’apprentissage avec le premier texte de référence
  • Du texte à l’apprentissage avec les textes de référence suivants
  • Stratégies de lecture, différenciation et atelier individualisé

À visionner en complément :

Jacques BORZYKOWSKI, Nathalie DE WOLF, Patrick MICHEL, Du sens au signe du signe au sens. Des adultes apprennent à lire, Collectif Alpha/VIDEP, 2016, 94 min.

Ce film complète la méthode présentée dans l’ouvrage et permet de se rendre compte de la manière dont sont utilisés les outils qui y sont proposés. Nous y suivons les apprenants d’un groupe de lecture-écriture débutant lors de séances individuelles d’évaluation à la fin d’une année de cours au Collectif Alpha de Molenbeek. Tout ce qu’ils sont amenés à lire durant cette séance est issu du travail de l’année basé sur l’exploitation de l’album Péric et Pac (Jennifer DALRYMPLE, École des Loisirs, 1994).

Marie FONTAINE, Kristine MOUTTEAU, Atelier ECLER (Écrire, Communiquer, Lire, Exprimer, Réfléchir). Apprendre à écrire en écrivant librement, Collectif Alpha, 1001 idées pour enrichir sa pratique en alphabétisation, 2017, 64 p., www.cdoc-alpha.be/Record.htm?idlist=10&record=19110756124919389389

L’atelier ECLER offre un cadre autorisant et sécurisant qui permet d’entrer dans l’écriture, mais aussi d’apprendre les règles et normes de la langue (grammaire, orthographe). Les apprenants y écrivent seuls un texte libre qui sert ensuite de base aux apprentissages par le biais d’une révision individuelle, accompagnée par le formateur, qui amène l’apprenant à réfléchir et agir grâce au dialogue. Les apprentissages sont ensuite systématisés et ancrés par des exercices, toujours sur base de ce même texte. Enfin, la version finale du texte est donnée à lire à tous les membres du groupe puisqu’écrire est un acte de communication. Cette démarche, qui permet d’individualiser les apprentissages en gardant une dynamique de groupe, est particulièrement indiquée pour des groupes hétérogènes.

Lire également :

Noël FERRAND, ECLER, une méthodologie, un esprit, une pratique pour maitriser la langue à partir de l’écriture personnelle, Forum Lecture Suisse, 2013, 21 p., www.forumlecture.ch/myUploadData/files/2013_2_Ferrand.pdf

Guy BOUDREAU, Le langage intégré, RGPAQ, Visa pour l’alpha pop, n°5, 1992, 71 p., bv.cdeacf.ca/RA_PDF/2748.pdf

Le langage intégré est une approche pédagogique originale pratiquée dans les groupes d’alphabétisation populaire du Québec qui préconise l’apprentissage simultané de la lecture et de l’écriture, et ce en continuité avec l’expression orale. La démarche pourrait se résumer ainsi : l’apprentissage de la lecture et de l’écriture se fait à travers l’expérimentation de l’écriture. À la manière de l’écrivain qui prépare un projet de roman ou de biographie, la personne apprenante découvre, par l’intermédiaire d’un projet d’écriture, les différentes étapes que l’écriture implique : elle exerce sa réflexion, elle fait de la recherche, elle organise logiquement des éléments, elle vérifie et intègre des notions de grammaire… Le tout à partir du principe que si on écrit dans la vie, c’est pour être lu !

Le document se structure en deux parties : la première est consacrée à la lecture et la seconde à la production de textes et à l’apprentissage de l’écriture.

À lire en complément :

Martine FILLION, Pouvoir se dire… Les pratiques d’écriture autonome et de lecture en alphabétisation populaire, RGPAQ, 2006, 36 p., bv.cdeacf.ca/RA_PDF/96587.pdf

Après un rapide survol des principes et concepts de l’approche intégrée, ce document se présente comme un espace de réflexion sur les pratiques de langage intégré en alphabétisation populaire au Québec. Essentiellement constitué d’exemples de pratiques, il est d’abord et avant tout une sorte de boite à outils (idées de projets, amorces d’activités…) pour travailler l’écriture autonome, souvent moins développée que son pendant, la lecture autonome.

Sophie ZEOLI, Journal de bord d’une formatrice en alphabétisation. Une année de cheminement pédagogique, Les Éditions du Collectif Alpha, Les Cahiers du Collectif Alpha, n°2, 2011, 78 p.

Cet ouvrage relate le cheminement pédagogique d’une année de cours et d'(auto)-formation. Il s’agit du récit chronologique des moments clés de l’année ainsi que des expériences les plus intéressantes vécues avec un groupe de lecture-écriture niveau 2. L’ouvrage ne propose pas de recettes toutes faites pour aborder un groupe d’apprenants en alphabétisation mais plutôt des arrêts sur images relatifs à différentes découvertes, aux difficultés rencontrées ainsi qu’à la recherche et la mise en œuvre de solutions.

Dans ce journal de bord, l’aspect réflexif est particulièrement intéressant car, si en alphabétisation, et notamment au Collectif Alpha, les formateur·rice·s peuvent s’appuyer sur de solides principes méthodologiques, l’autrice montre que, néanmoins, l’exercice de leur métier exige une créativité permanente, une réflexion pédagogique continue et un véritable sens de l’adaptation.

Stella BARUK, Comptes pour petits et grands (deux volumes : Pour un apprentissage du nombre et de la numération fondés sur la langue et le sens et Pour un apprentissage des opérations, des calculs et des problèmes fondés sur la langue et le sens), Magnard, 1997 et 2003, 244 p. et 352 p.

« Après avoir, dans plusieurs ouvrages, tenté de comprendre d’où venait l’échec scolaire massif en mathématiques, Stella Baruk s’est dit qu’il était temps, face à ces constats, de faire une proposition constructive. Il en est résulté deux tomes, l’un concernant le nombre et la numération, l’autre les opérations et le calcul. Titrés Pour petits et grands, ces deux tomes alternent chapitres pour les adultes en charge d’aider des ‘petits’ à la compréhension mathématique, et propositions pratiques d’exploitation avec ces mêmes ‘petits’. Ouf ! On ne nous dit pas seulement ‘voilà comment faire’, on prend aussi le temps de nous expliquer le pourquoi du comment. De mon point de vue, ces livres, et en particulier le premier, constituent des indispensables. Bien sûr, ils sont au départ destinés à l’enseignement primaire, mais ils sont tout à fait adaptables à des adultes en alphabétisation. La manière qu’a Stella Baruk d’aborder la numération est au départ surprenante, mais très convaincante à la lecture et à l’expérimentation sur le terrain ! »(Frédéric Maes, in Journal de l’alpha, Les maths, parent pauvre de l’alpha ?, n°186, novembre-décembre 2012, p. 103, www.lire-et-ecrire.be/ja186)

À lire en complément :

Stella BARUK, Mes premières mathématiques avec Némo et Mila CP (deux volumes : Guide du maitre et Fichier de l’élève), Magnard, 2012, 212 p. et 144 p.

Stella Baruk concrétise ici les fondements de sa pédagogie pour permettre aux élèves de construire solidement, individuellement et collectivement, leurs premiers savoirs mathématiques par la maitrise de leurs notions fondatrices, de leurs méthodes et de leur langage spécifique, en lien constant avec la langue commune. L’apprentissage des mathématiques y est ainsi déployé, domaine par domaine : numération orale et écrite, opérations, résolution de problèmes, mesures et grandeurs.

Paul LE BOHEC, Le texte libre mathématique. La Méthode Naturelle, ICEM, 1993, 204 p.

Dans ce livre, l’auteur prône l’apprentissage des mathématiques au moyen d’une méthode naturelle inspirée de celle de Célestin Freinet. Il l’a élaborée en travaillant d’abord avec des classes d’enfants et ensuite au cours de nombreux ateliers avec des adultes. Cette méthode se fonde sur la prise en compte de la complexité des individus, des groupes et des situations, sur une appréhension globale de la connaissance, sur la prise en compte de l’affectivité utilisée comme catalyseur de l’acquisition du savoir, sur le plaisir, le travail communautaire et la dialectique sagesse-savoir, entre autres.

Paul Le Bohec part du constat que les propositions pédagogiques des éducateurs sont naturellement subjectives. Elles reflètent la façon dont ils comprennent la mathématique. Pour lui, il est fondamental de cerner les rapports entre la mathématique et l’éducation. La mathématique est une stratégie développée par l’espèce humaine au cours de son histoire pour comprendre et expliquer la réalité sensible, perceptible, mais aussi pour la manipuler, cohabiter avec elle et s’y appuyer pour développer son propre imaginaire. L’éducation est quant à elle une stratégie de stimulation au développement individuel et collectif. En conséquence, mathématique et éducation sont des stratégies complètement interdépendantes.

Concrètement, l’auteur propose de partir des réalisations de l’apprenant, comme dans la Méthode Naturelle de Lecture-Écriture (MNLE). Cette méthode réalise une telle rupture avec notre pensée habituelle que sa mise en œuvre exige cependant de la part du formateur une grande maitrise et une certaine aisance dans le domaine des mathématiques afin de pouvoir rebondir et exploiter ces réalisations.

Dans ce recueil, on trouve finalement « un peu de tout », du récit d’expériences scolaires aux réflexions philosophiques, en passant par le compte rendu de séminaires sur la méthode naturelle en mathématiques.


  1. « La pédagogie ne peut échapper au problème de la finalité : éduquer, c’est toujours viser un but, c’est nécessairement se tourner vers l’avenir (de l’individu, de la société). Par définition, l’action éducative est politique. Par définition, l’action éducative est normative. On ne peut poursuivre des fins sans choisir des moyens. Réciproquement, les moyens doivent être choisis en fonction de leur adéquation vis-à-vis des finalités retenues. » (Francis TILMAN et Dominique GROOTAERS, Les chemins de la pédagogie. Guide des idées sur l’éducation et l’apprentissage, Chronique Sociale, 2006, p. 13).
  2. Concernant Paulo Freire, voir la sélection bibliographique publiée dans le Journal de l’alpha sur Reflect-Action (n°163, avril 2008, pp. 59-65, www.lire-et-ecrire.be/ja163).

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