En Flandre, la Basiseducatie, la formation aux compétences de base, est depuis 2007 organisée par le ministère de l’Enseignement. Depuis lors, les quelque 1 800 formateurs des 13 Centra Basiseducatie couvrant le territoire des provinces flamandes et de Bruxelles sont en principe titulaires d’un diplôme pédagogique. Des dispositifs de formation de formateurs spécifiques aux adultes peu scolarisés, ancrés dans la pratique et les réalités de terrain, ont existé auparavant mais ne sont plus organisés aujourd’hui.

Et en Flandre, qui sont les formateurs ?

Louise Culot, chargée d’analyses et études, Lire et Écrire Communauté française

Une approche fonctionnelle

Chez nos voisins belges d’expression flamande, l’analphabétisme est plus souvent nommée « ongeletterheid »1 et la formation en alphabétisation, Basiseducatie. La conception de l’alphabétisation qui nous semble être, selon la typologie de Véronique Leclercq2, à l’œuvre en Flandre est « managériale », dans le sens où l’objectif et l’approche des formations sont fonctionnels : les apprenants (« kursisten ») suivent la formation pour pouvoir fonctionner pleinement dans la société ; le dispositif de formation et l’action du formateur sont déterminés à partir de cet objectif. LIGO, la fédération regroupant les centres d’éducation de base en Flandre, définit ainsi la littératie (« geletterheid ») : « Savoir utiliser, traiter, formuler des messages et de l’information. Être capable d’utiliser la langue, les chiffres, et d’utiliser les TIC. La littératie est importante pour fonctionner et participer à la société et pouvoir se développer comme personne. » L’approche andragogique se veut donc fonctionnelle et intégrée. Dans cette optique, les cours de langue, de numérique, de mathématiques sont intégrés dans un projet de formation propre à l’apprenant.

Voici un extrait de leur vision, telle qu’elle est présentée sur le site internet de l’organisation :

« Ligo veut être un levier de changement dans la société. Notre offre de formation vise cinq impacts prioritaires :

  • 1   L’apprenant a plus de chance de trouver un emploi et d’être mieux situé sur le marché de l’emploi.
  • 2   L’apprenant est renforcé dans son rôle de parent pour accompagner la scolarité de ses enfants.
  • 3   L’apprenant organise mieux sa vie quotidienne.
  • 4   L’apprenant est un citoyen critique et conscient.
  • 5   L’apprenant a une position forte en tant que consommateur. »3

Comme ailleurs en Europe occidentale, les problèmes d’illettrisme sont en Flandre souvent associés aux personnes primo-arrivantes, allochtones et allophones. Pourtant, d’après les enquêtes PIAAC (Programme for the International Assessment of Adult Competencies, 2013) et IALS (International Adult Literacy Survey, 1996) auxquelles la Flandre a participé, 15% des Flamands sont en situation d’illettrisme. Notons, à ce propos, que la Flandre prend comme référence le niveau de compétences équivalent au secondaire inférieur comme seuil en dessous duquel une personne est considérée comme illettrée.4

En Flandre, la formation de base est aujourd’hui organisée par les Centra Basiseducatie ou CBE, des a.s.b.l. financées sur le budget de l’Enseignement (« Onderwijs ») et regroupées en réseau au sein de LIGO. Il y a aujourd’hui 13 CBE qui couvrent l’ensemble du territoire des six provinces flamandes et de Bruxelles. Les centres s’adressent à toutes les personnes peu ou pas lettrées, qu’elles soient allées à l’école en néerlandais ou pas, et offrent des formations en langue, en mathématiques et en compétences technologiques. Les cours sont gratuits pour les chômeurs, pour les personnes en parcours d’intégration, mais pas pour les autres.

Trajectoire du secteur

Dans les années 1970, des militants du milieu syndical organisent des formations en alpha pour des personnes néerlandophones (NT1 dans leur jargon). Les quelques initiatives sont imprégnées des valeurs d’égalité des chances et du droit à une formation de la seconde chance. Une dizaine d’années plus tard, le ministère de la Culture octroie les premiers financements à des projets d’alphabétisation. En 1985, les Centres flamands pour l’Éducation populaire sont créés, prémices des CBE établis en 1990 suite à l’adoption d’un décret sur l’Éducation de base des adultes peu scolarisés.

En 1991, la Fédération des CBE, qui deviendra plus tard le Netwerk Basiseducatie puis LIGO, nait d’une volonté du secteur d’être représenté et de coordonner son action. Les centres se dotent ainsi d’une vision et d’une mission communes, et affirment la spécificité du secteur et du métier de formateur en compétences de base vis-à-vis du secteur plus large de l’éducation des adultes (« volwassenenonderwijs »).

Peu à peu, face à la pression de l’opinion publique qui exige que les allophones apprennent davantage le néerlandais, le secteur s’investit dans le NT2 alfa (équivalent de l’alpha pour non-francophones). « Nous voulions des ressources supplémentaires parce que nous avions besoin de plus de personnel. Le gouvernement a accepté de donner plus de ressources en échange de plus de contrôle. C’est pourquoi nous avons été intégrés aux compétences du ministère de l’Enseignement. » En 2007, la Flandre déplace donc la tutelle de la Basiseducatie des Affaires sociales à l’Enseignement5. Cette réforme amène évidemment le secteur à évoluer, notamment à affirmer sa spécificité par rapport aux Centra voor Volwassenenonderwijs (CVO, équivalent de la Promotion sociale chez nous) qui faisaient déjà partie de l’Enseignement, et étaient (et sont toujours) des acteurs importants du NT2. Au même moment, les 29 centres fondés en 1990 sont fusionnés en 13 centres répartis en Flandre et à Bruxelles.

Formation des travailleurs

La réforme aura un effet déterminant sur le profil des travailleurs du secteur6. Jusqu’en 2007, les formateurs avaient plutôt un profil de travailleur socioculturel. Une formation continuée spécifique (en néerlandais Voortgezette opleiding basiseducatie, ou VOBE) et certifiante était obligatoire pour les travailleurs des CBE, mais aucun diplôme spécifique n’était requis. Le VOBE permettait d’accéder au barème sectoriel indépendamment de la formation initiale. Le VOBE abordait la didactique d’alpha, les fonctions cognitives des adultes, et impliquait l’écriture d’un travail dans lequel le candidat présentait son projet comme formateur en alphabétisation. La formation était dispensée par deux hautes écoles, et durait entre 1 an et 18 mois selon les périodes.

À partir de 2007, un processus de professionnalisation des formateurs s’impose au secteur dans le contexte du transfert de la tutelle vers le ministère de l’Enseignement. « L’avantage, en termes de statut, était que nous devenions enseignants », expliquent Sulotta De Clercq et Leontien Flussie, en charge des processus éducatifs à LIGO. Qui dit statut, dit barème, mais aussi diplôme. A partir de 2008, la formation spécifique au métier de formateur en compétences de base (la VOBE) n’est plus organisée, mais (ou car) tous les travailleurs du secteur, au même titre que tous les autres enseignants, sont censés être en possession au minimum d’un bachelier à orientation pédagogique ou s’engager à l’obtenir endéans les deux ans suivant la signature de leur contrat. Les candidats formateurs sont donc soit formés pour être enseignants dans le primaire ou dans le secondaire, soit titulaires d’une agrégation. S’ils n’ont pas de titre pédagogique, ils peuvent être engagés mais devront endéans deux ans suivre une formation d’enseignant comme le parcours Leraar-in-Opleiding (LIO) qui permet d’être dispensé des stages (puisque la personne est déjà active sur le terrain) et de percevoir le salaire barémique propre au secteur pendant sa formation. Le barème des formateurs en Basiseducatie est fixe, que les formateurs soient titulaires d’un master ou d’un bachelier.

En 2014, dans le contexte de l’afflux de réfugiés syriens, l’augmentation du nombre d’apprenants met les centres sous pression. Ils ont non seulement besoin de recruter du personnel, mais aussi d’accompagner les nouveaux formateurs. C’est pour répondre à cette situation qu’en 2015, un profil de fonction est proposé par LIGO en concertation avec tous les acteurs du réseau. L’objectif est de s’accorder sur une vision commune du rôle des formateurs et du spectre de tâches qu’ils doivent endosser dans tous les CBE. Le document est adressé aux formateurs et formateurs candidats, afin de clarifier ce qui est attendu d’eux mais sert aussi aux centres pour développer un plan d’accompagnement et de formation en interne cohérent avec leur fonction. Les formateurs y sont définis comme des « fournisseurs de services s’adressant à des clients »7. Les formateurs sont donc au service des stagiaires, mais aussi des collègues administratifs et pédagogiques, de la direction, des partenaires des centres, etc.

La fonction du formateur est donc formulée en termes d’attentes « universelles » qui vont être affinées en fonction des situations spécifiques et donner lieu à différents descriptifs de tâches :

  • Donner cours : accompagner et soutenir les apprenants à partir d’un modèle didactique. Exemples de tâches : aborder chaque apprenant en fonction de son histoire, comprendre les besoins du stagiaire, construire un environnement d’apprentissage sûr, stimulant et attentif à la dynamique du groupe, etc.
  • Se concerter avec les collègues pour améliorer le fonctionnement des centres. Exemples de tâches : contribuer aux structures de fonctionnement du centre, mettre son expertise à profit des autres travailleurs, etc.
  • Collaborer avec les collègues, les stagiaires et les partenaires extérieurs. Exemples de tâches : prendre part aux activités de sensibilisation et de promotion des actions, accompagner les volontaires, échanger du matériel avec les collègues, etc.
  • Continuer à apprendre et à se former. Exemples de tâches : prendre part à des activités de supervision et de « coaching » entre pairs, garder un regard critique vis-à-vis de sa pratique, suivre les développements sociaux et technologiques, etc.

Toujours en 2015, le profil de fonction du formateur est complété par un profil de compétences, que LIGO établit sur base d’une concertation entre les CBE. Ce profil de compétences adresse la question suivante : quelles sont les compétences nécessaires pour répondre aux exigences du secteur ? La réponse est schématisée en quatre compétences génériques communes à tous les travailleurs de LIGO (être passionné, faire preuve d’ouverture, être organisé, agir avec intégrité) et deux compétences spécifiques aux formateurs : coacher et stimuler à apprendre, concevoir un environnement d’apprentissage. L’approche du métier est davantage pédagogique que sociale. Comme l’écrivait Catherine Bastijns en 2003, citant Nathalie Druine et sa thèse comparant les concepts à l’œuvre dans le dispositif flamand d’éducation de base et dans le travail d’alphabétisation en Wallonie8, « la basiseducatie est avant tout un projet éducatif : le contrôle de qualité et l’évaluation, l’organisation des cours en modules et les passerelles avec la formation professionnelle constituent des centres d’intérêt prioritaires. »9

Avec ces deux documents, LIGO saisit l’occasion de répondre à l’une des préoccupations du secteur depuis son transfert au budget de l’Enseignement : être reconnu comme un partenaire sectoriel structuré et efficace en garantissant une formation de qualité et adéquate aux apprenants.

À partir de 2016, une fois passée la « crise des réfugiés », le besoin de personnel s’estompe partiellement10. Toutefois, les centres continuent d’insister sur la nécessité de former le personnel en interne, dans un esprit de formation continuée, afin de mieux répondre aux spécificités du métier de formateur en compétences de base.

« Les formateurs ont le plus souvent une formation d’instituteur, ou de professeur de secondaire. La spécificité de la formation de base des adultes n’y est pratiquement pas abordée. Certaines universités et hautes écoles (KULeuven, Odisee, U Gent, CNO) proposent des postgraduats en NT2, au sein desquels ils intègrent des formations continuées (nascholingen) à la didactique des compétences de base en NT2. Mais il s’agit de formations assez limitées, qui ne constituent pas une formation initiale spécifique au métier de formateur en compétences de base », explique Els Plessers du CBE Brusselleer. Bien sûr, les CBE peuvent accueillir des stagiaires chez eux et former ainsi, par la pratique, des enseignants qui souhaiteraient se diriger vers le secteur de la Basiseducatie. En outre, certaines hautes écoles formant les futurs enseignants organisent des modules d’apprentissage relatifs à la formation de base des adultes en partenariat avec l’un ou l’autre centre LIGO. Mais il s’agit ici davantage de projets de sensibilisation autour de l’illettrisme et de l’existence du secteur – pour visibiliser un secteur encore considéré comme confidentiel – que de cursus spécifique au métier de formateur. 

Comme dans les régions francophones pour le FLE, la formation des professeurs ou formateurs en NT2 s’est, en Flandre, davantage et plus rapidement institutionnalisée que celle qui concerne la formation aux compétences de base, avec la création de parcours d’études spécifiques, notamment de postgraduats. Et c’est d’une manière ou d’une autre plutôt dans ce paysage-là qu’une esquisse de formation initiale des formateurs en compétences de base existe aujourd’hui.

Pendant quelques années, l’organisation VOCVO (Vlaams ondersteuningscentrum voor het volwassenenonderwijs) qui est notamment en charge de l’éducation en milieu pénitentiaire11 et de la publication Wablieft, un hebdomadaire en ligne écrit en langage pour tous, a proposé un parcours de formation continuée à destination des formateurs en compétences de base, appelé FUGE (pour FUnktionneel en GEintegreerd). Cette formation avait été conçue en partenariat avec un formateur du CBE bruxellois, Brusselleer. Elle n’était pas obligatoire, mais était proposée aux travailleurs des CBE, et était davantage orientée vers la pratique et le savoir empirique que la VOBE ne l’était à son époque. Malheureusement, la formation n’a plus été financée à partir de 2019-2020 ; VOCVO a donc arrêté de l’organiser.

La plupart des CBE essaient aujourd’hui de s’organiser en interne, en favorisant le travail en binôme entre formateurs novices et formateurs expérimentés, également en proposant des échanges de pratiques. Chaque centre a une stratégie de formation propre. « Chez nous, il y a des moments de supervision, tous les mois, qui peuvent aussi donner lieu à des échanges entre formateurs. Nous avons quelques ateliers ou formations courtes pour les formateurs, mais l’offre est limitée. Si le FuGe était à nouveau organisé, cela serait surement une bonne chose pour le secteur », explique Els Plesser de Brusselleer. LIGO essaie de développer un plan d’accompagnement harmonisé pour tous les centres, un plan de formation qui serait coordonné pour tous les CBE. « En ce moment, il y a deux pistes sur lesquelles nous travaillons, mais elles restent hypothétiques. La première serait d’établir un trajet spécifique au sein de la formation des enseignants (dépendant d’une université ou d’une haute école) dans laquelle les futurs enseignants seraient sensibilisés au faible niveau d’alphabétisation d’une part, mais d’autre part aussi informés sur le fonctionnement de l’éducation de base (vision éducative, politique d’impact, réseau Basiseducatie,…). La deuxième serait d’investir dans la formation continue des professionnels déjà en fonction. Nous aimerions que les deux pistes coexistent, mais ça demandera du temps, un budget et des négociations », concluent Sulotta et Leontien de LIGO.

Une professionnalisation par le diplôme

Dans ce qui précède, il apparait qu’en Flandre, le processus de professionnalisation du métier de formateur est passé par l’imposition d’un titre requis et par la formulation univoque de compétences déterminant les contours de la fonction. La professionnalisation est donc envisagée davantage d’un point de vue théorique que pratique ; les savoirs empiriques venant dans un second temps, en fonction des opportunités proposées par les employeurs et les collègues de terrain.

De notre point de vue, ce processus a été provoqué par le transfert de la tutelle du secteur en 2007, donc par une exigence externe davantage que par une nécessité interne au secteur. Quoique cette professionnalisation venue d’en haut a eu l’avantage de faire accéder les formateurs au statut d’enseignant, elle est en quelque sorte appauvrissante du point de vue de la formation des formateurs, puisqu’elle a entrainé la suppression d’une formation plus ancrée dans les réalités du terrain, qui permettait de distinguer le travail d’un formateur en alpha de celui d’un formateur en néerlandais ou langue étrangère, notamment en lui attribuant une fonction sociale plus importante. Pour paraphraser Catherine Bastijns, « il ne fait pas de doute que, du côté francophone, lassés quelquefois de ‘chasser le subside’, de jongler avec plusieurs dossiers et plusieurs timings pour financer le même projet, et dubitatifs à l’idée qu’une même action puisse être entrevue selon des logiques souvent contradictoires, certains ont parfois lorgné avec envie vers le décret flamand. Mais cette confortable médaille a aussi, on le constate, de sérieux revers… »12


  1. Traduction en néerlandais du terme francophone de littératie. Le phénomène d’illettrisme ou d’analphabétisme est donc désigné par « ongeletterheid » plutôt que par « analfabetisme » qui existe aussi mais n’est plus usité en Flandre.
  2. Véronique LECLERCQ, Communication au colloque international La littéracie : le rôle de l’école à l’IUFM de Grenoble en octobre 2002. Résumé dans l’article : V. LECLERCQ, Formation de base des adultes, quelles conceptions de la maîtrise de l’écrit et de son développement : l’exemple de quatre pays francophones, in Revue LIDIL, Université de Grenoble, 2003, pp. 145-160.
  3. Traduction libre du néerlandais. Voir website : https://www.ligo.be/missie-en-visie.
  4. https://onderwijs.vlaanderen.be/nl/geletterdheid/cijfers-en-onderzoek-over-geletterdheid/cijfers-over-geletterdheid.
  5. Quand il y a des « crises des réfugiés » (en 2015-2016 notamment), les centres reçoivent aussi des enveloppes pour l’accueil des migrants, financées par le ministère de l’Intégration.
  6. La réforme aura également un effet sur les apprenants car, à partir de ce moment, les apprenants sans papiers ne sont plus admis en formation.
  7. Traduction du néerlandais « dienstverlener naar onze klanten toe ».
  8. Nathalie DRUINE, Geletterdheid : van kapitaal belang ? Opvattingen over geletterdheid in de Vlaamse basiseducatie en het Waalse alfabetiseringswerk, Thèse défendue à la KULeuven, 2000.
  9. Catherine BASTYNS, Alphabétisation et éducation de Base en Flandre, in Lectures, n°130, mars-avril 2003, pp. 42-44, www.calameo.com/books/0010703739b396d510715
  10. Le secteur de la Basiseducatie n’échappe pas à la pénurie, dans le paysage de l’éducation qui, en Flandre, est largement marqué par le manque de candidats.
  11. VOCVO est une organisation sous tutelle du ministère de l’Enseignement en charge du Plan stratégique d’alphabétisation (Strategisch Plan Geletterdheid), de la formation en milieu carcéral et de la publication de Wablieft. Voir : https://www.vocvo.be/nl ; www.wablieft.be/nl/abo/wablieft.
  12. Catherine BASTIJNS, op.cit.